J’ai mis du temps à entrer dans l’œuvre de DOA. La littérature de guerre, d’espionnage, d’actualités, n’est généralement pas ma tasse de thé (+ miel + scotch). J’ai connu l’armée de près et ce que j’aime lire en temps normal est aux antipodes de ce monde. Cela dit, faillir à la curiosité, qualité première de l’écrivain, c’est pécher contre-nature. Si tu n’as pas cette curiosité, qui mène aux voyages, à la connaissance de l’autre, tu deviens vite une gourde de peau sèche et rabougrie, incapable d’écrire. Même si je voyais mal comment concilier la froideur légendaire des services souterrains, l’armée, les milices, les journalistes et la littérature, je me suis lancée, piquée par le souvenir d’ARBRE DE FUMÉE de Denis Johnson, que j’avais beaucoup aimé.
Concernant l’acronyme DOA, la démarche identitaire m’intéresse. Il n’a pas immédiatement écrit sur la guerre et ses dépendances. Le besoin d’anonymat vient d’ailleurs. Comme nombre d’entre nous, il se protège, il le dit, et essaie de démarquer l’individu social de l’écrivain qui fait œuvre. Dans le fond, c’est peut-être illusoire, l’écrivain met toujours de lui-même ou d’elle-même dans ses romans. Il ou elle peut cependant essayer de cacher son identité derrière plusieurs autres, histoire de s’appartenir un peu plus dans ce monde où les individus s’oublient, se dissolvent entre avatars et sentiments virtuels. Le nom, comme pour les personnages de PUKHTU, c’est le dernier bastion identitaire, la seule chose qu’on ne peut pas t’ôter pour l’instant, ce que tu peux garder pour toi.

©Mantovani/Gallimard
Après tout ce que j’ai lu comme livres, j’ai patienté à la sortie de PUKHTU PRIMO parce que j’avais peur de passer à côté. Je suis souvent déçue (par moi-même d’abord). Quelques livres bien sympathiques au demeurant se digèrent trop vite car ils ne sont pas assez bien écrits ou ne creusent pas assez loin à mon goût, d’autres apprennent à voler jusqu’à déchirer leur rêve de hauteur sur un pan de mur. Avec le poids des romans de DOA, je pouvais difficilement me permettre de faire un trou dans mon placo. Blague facile mise à part, je me doutais bien que ce ne serait pas le cas, DOA ne commettant pas un livre tous les ans. Je me suis décidée quand une ex-libraire m’a confié d’une moue agacée : « Vous allez être publiée par la Série Noire ? Il y a DOA là-bas. Je l’ai rencontré et je le trouve assez prétentieux. » Je lui ai souri d’un air moqueur genre « Toi, tu as aimé ses romans puis tu t’es pris un râteau (quelconque). » Souvent, ça tient à ça : si tu ne lèches pas la paume de certains libraires, ils pensent pouvoir te la mettre dans la gueule. Heureusement, la plupart ne sont pas de ce petit calibre.
Mais revenons à PUKHTU. Quelques mois plus tard, j’offrais PUKHTU PRIMO à mon frère, parti quatre mois en Afghanistan Continuer la lecture de DOA, l’écrivain à l’œuvre – 1/2 →
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